Affaires familiales : l’appétit croissant des family offices pour le capital-investissement

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Vision de marché

Affaires familiales : l’appétit croissant des family offices pour le capital-investissement

  • 15 Mai 2020

  • Private Equity

  • Ardian

Temps de lecture : 5 minutes

    Le capital-investissement est l’une des classes d’actifs ayant procuré le meilleur rendement aux family offices en 2019. À l’heure où les familles cherchent à renforcer le contrôle sur leurs portefeuilles pour cause de volatilité des marchés, la demande d’exposition au capital-investissement est appelée à croître à long terme.

    Au cours de la dernière décennie, les family offices sont devenus un groupe de parties prenantes de plus en plus influent et important pour les sociétés d’investissement. Leur nombre a fortement augmenté, tout comme le capital placé sous leur gestion.
    Selon Credit Suisse, le nombre de millionnaires sur terre a presque triplé entre 2010 et 2019, passant de 13,8 à 46,8 millions. On estime à présent à 56 000 le nombre de personnes possédant une fortune supérieure ou égale à 100 millions d’US$. Dans le même temps, le Global Family Office Report 2019, produit par UBS et Campden Research, montre que le nombre de family offices progresse depuis le tournant du siècle : 35 % d’entre eux ont en effet été lancés pendant la décennie entamée en 2010, et 33 % ont ouvert au cours des dix premières années du nouveau millénaire.
    Le nombre de family offices et de grandes fortunes allant croissant, l’approche de gestion des portefeuilles familiaux évolue elle aussi. Les family offices sont ainsi passés d’un modèle d’investisseurs opportunistes, exploitant leurs réseaux industriels et leur expertise sectorielle pour procurer des opportunités, à celui de programmes d’investissement discipliné prévoyant une plus grande allocation en actifs alternatifs sophistiqués.
    D’après UBS et Campden, les actions représentent toujours la première source d’allocation des family offices, à hauteur d’un peu moins d’un tiers des portefeuilles. Mais les alternatives pèsent maintenant en moyenne pour 40 % des portefeuilles, dont 19 % vont vers le capital-investissement. Plus des quatre cinquièmes (81 %) des family offices procèdent désormais à des investissements dans un véhicule de capital-investissement.
    « Les family offices deviennent de grands acteurs du capital-investissement, et l’on constate une augmentation notable de l’appétit pour les actifs de capital-investissement », note Jan Philipp Schmitz, Responsable Allemagne et Asie chez Ardian, qui dirige aussi l’activité Mandats au sein du cabinet. « La longue période de détention, la relative illiquidité et le supplément de rendement sur capitaux investis collent généralement bien aux objectifs d’un family office », ajoute-t-il.
    M. Schmitz fait également observer la tendance croissante des grands gestionnaires d’actifs alternatifs à ouvrir leurs fonds aux familles. Les investisseurs institutionnels, nombreux à avoir déjà procédé à d’abondantes allocations en capital-investissement, ont en revanche peu de chances d’étoffer leurs portefeuilles alternatifs.

    Les family offices sont devenus des acteurs plus importants dans le domaine du capital-investissement, et on a constaté une augmentation notable de l'appétit pour les actifs du capital-investissement.

    Jan Philipp Schmitz, Membre du Comité Exécutif, Head of Ardian Germany et Ardian Asia

    Le capital-investissement, facteur de performances

    Les family offices ayant investi dans les actifs de capital-investissement n’ont pas regretté de les avoir mis dans leur portefeuille. Selon UBS et Campden, en 2019, le capital-investissement est la classe d’actifs ayant procuré le meilleur résultat aux family offices, qui en ont retiré un rendement moyen de 17 % avec les transactions directes et de 11 % avec les investissements réalisés par le biais de fonds. À titre de comparaison, la performance globale du portefeuille s’est élevée à 5,4 %, quand, de leur côté, les actions des marchés développés n’ont progressé que de 2,1 %.
    De manière générale, la dispersion des rendements entre classes d’actifs alternatives et traditionnelles a déjà induit un glissement marqué des marchés publics vers les marchés privés, trajectoire qu’empruntent eux aussi les family offices. 
    « Un glissement est à l’œuvre des marchés publics vers les marchés privés. Les données de la Banque mondiale montrent par exemple que le nombre d’entreprises cotées aux États-Unis a presque fondu de moitié, passant de plus de 8 000 à tout juste 4 300 en 2018 », précise M. Schmitz. « Les family offices suivent cette tendance. Les investissements sur les marchés privés offrent davantage de contrôle sur leurs participations et leur permettent d’échapper à la volatilité et aux fluctuations de court terme. »

    Une même communauté, des profils pluriels

    Si de manière générale, les family offices prennent le chemin d’une plus grande allocation sur les marchés privés, leur communauté n’en constitue pas moins un groupe diversifié poursuivant une palette d’objectifs particulièrement variée.
    « Les family offices sont très nombreux. Leur taille et leur appétit pour le risque varient, et chacun a des objectifs d’investissement et des horizons temporels distincts. Les profils se granularisent très vite », indique M. Schmitz.
    Globalement, les family offices se rassemblent en trois grandes catégories. On distingue tout d’abord les grands single-family offices, qui, solidement réseautés, ont la capacité de constituer des portefeuilles alternatifs diversifiés et visent des tickets d’investissement élevés. Viennent ensuite les multi-family offices, caractérisés par une coordination des activités et le partage des ressources et du personnel ; enfin, on trouve les petits family offices, réunis par des banques privées pour mutualiser leur capital. 
    Or satisfaire les multiples exigences d’une base d’investisseurs déjà significative et de plus en plus riche n’est pas sans poser de difficultés aux gestionnaires de capital-investissement, habitués à traiter avec de grandes institutions.
    Cela dit, les gérants adaptent en ce moment leurs modèles suivant le capital des family offices. À titre d’illustration, l’activité Mandats d’Ardian que dirige M. Schmitz propose des solutions d’investissement personnalisées pour un seul et même compte. Le produit, en approfondissant l’accès à un large catalogue de niches et de régions sur les marchés privés, fournit une exposition aux fonds pilotés par Ardian et d’autres gestionnaires. 
    Les family offices les plus expérimentés, qui créent et vendent des entreprises, peuvent donc privilégier des stratégies de co-investissement dans des secteurs ciblés, tandis que les nouveaux entrants s’orientent vers les fonds ou les fonds de fonds, avec assistance au pilotage du portefeuille si nécessaire. 
    L’intérêt pour l’offre est tel qu’Ardian a enregistré plus de 3 milliards d’US$ d’entrées dans sa plateforme de mandats en 2018 et déployé 5 milliards d’US$ de capital sur ses comptes mandatés la même année. 
    Les autres gérants, qui mettent en place des plateformes de comptes spéciaux similaires, constatent la même croissance des investissements. Selon le conseiller de fonds Triago, plus de 150 milliards d’US$ ont été engagés dans des co-investissements, des comptes à gestion distincte et des opérations directes au cours des neuf premiers mois de 2019.

    Les années passant, Ardian a travaillé avec plusieurs centaines de family offices. Nous avons co-investi ensemble, nous nous sommes rachetés et vendus des entreprises, et nous avons noué des relations », rapporte M. Schmitz. « Certaines familles veulent faire des opérations directes, d’autres préfèrent les investissements secondaires. D’autres encore souhaitent miser sur les fonds, mais n’en ont pas les capacités. Le potentiel de levée de fonds par les family offices est immense, mais pour exploiter cette opportunité, encore faut-il que les gestionnaires optent pour une approche au cas par cas.

    Jan Philipp Schmitz, Membre du Comité Exécutif, Head of Ardian Germany et Ardian Asia